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Le quotidien de L'Expansion dans l’édition électronique de sa « newsletter » intitulée « Le 18h.com » numéro 1966, accueille Michel Testard, spécialiste de l'Inde des affaires, pour une interview.
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L'équipe du Forum est très heureuse que Michel appuie notre démarche d’information.
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Avec pour titre "L'Inde est sur orbite pour conquérir le monde" la journaliste Céline About recueille les explications de Michel sur les tractations et les grandes mutations « en cours » et « à venir » du business en Inde.
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Des groupes indiens multiplient les offensives sur les entreprises européennes. Carrefour est directement visé tandis qu'Areva se voit concurrencé dans son offensive sur RePower. Dans cet article Michel, analyse la montée en puissance des groupes Indiens.
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Avec l’autorisation de l’auteur, nous reproduisons dans la suite du billet l’intégralité de l’entretien.
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Les groupes indiens multiplient les offensives sur les entreprises européennes et les géants français en font les frais. A commencer par Carrefour. Le conglomérat indien Reliance aurait ainsi désigné deux banquiers d'affaires pour négocier l'achat d'une part minoritaire dans le n°1 français de la distribution. Mercredi, un haut responsable de Reliance a même affirmé que son groupe discutait avec le distributeur français d'une entrée à son capital ou de la création d'une société commune. Des négociations dont l'existence a été démentie par le groupe hexagonal. La presse indienne laisse entendre que Reliance lorgne tout ou partie des 13% détenus par le premier actionnaire de Carrefour, la famille Halley. Ce conglomérat présent dans le pétrole, la pétrochimie, les télécoms et les services financiers a réalisé en 2005/2006 un bénéfice net de 1,6 milliard d'euros pour un chiffre d'affaires de 14,6 milliards. Il s'est lancé fin 2006 dans les supermarchés, secteur dans lequel il veut investir 5,5 à 7 milliards de dollars au cours des prochaines années.
Autre "victime" de cet activisme indien : Areva. Le leader français du nucléaire, qui cherche à se diversifier dans les énergies nouvelles, a été contraint jeudi de relever considérablement son offre sur le fabricant d'éoliennes allemand REpower Systems, la portant de 105 euros par action à 140 euros. Et ce sous la pression du fabricant indien de turbines Suzlon Energy qui avait lancé une contre-offre à 126 euros. Areva devra donc verser au minimum 1,14 milliard d'euros au lieu de 850 millions initialement. Au minimum, car Suzlon serait prêt à porter son offre à 1,28 milliard d'euros, croit savoir la presse indienne. Or Areva a déjà eu du mal à faire accepter sa première surenchère par Bercy... Quoi qu'il advienne, ces deux initiatives sont révélatrices de la nouvelle puissance des entreprises indiennes, prêtes à conquérir les marchés mondiaux. C'est ce qu'explique Michel Testard, consultant international en management et auteur de "L'appel de l'Inde" (Editions Pearson Education France).
- Que révèlent ces deux offensives de groupes indiens ?
C'est une succession d'assauts qui remonte plus loin. Le premier coup de tonnerre a eu lieu lorsque Mittal a lancé son OPA sur Arcelor, même si l'entreprise n'était pas vraiment indienne. Plus récemment, il y a eu Tata Steel, qui a racheté l'anglo-néerlandais Corus, suivi d'autres actions dans la pharmacie. Venant d'Inde, on n'a pas à attendre d'exportations massives de produits ou de services. Les exportations indiennes s'élèvent à 150 milliards de dollars, c'est un septième des exportations chinoises. En revanche, de nombreuses entreprises indiennes sont en train de se mondialiser. Elles peuvent le faire parce qu'au cours des 15 dernières années, elles se sont modernisées et elles ont réduit leurs coûts, et parce qu'elles ont développé dans leur pays des modèles économiques très différents des nôtres, basés sur un immense marché et des prix faibles. Alors que chez nous, on vend à moins de monde mais plus cher. Ce sont donc des entreprises "low cost", très agiles, dirigées par des familles, ce qui les rend très mobiles. C'est souvent un fils qui est aux commandes, avec sa famille aux différents postes de direction. Il décide donc souverainement, ce qui explique que ces entreprises vont très très vite et qu'on ne les voit pas venir.
- Elles sont donc très différentes de nos entreprises occidentales ?
Oui, pour l'instant. Ce sont des petites boites qui montent extrêmement vite, avec des croissances de 30 à 40%. On les considérait comme émergentes et bas de gamme. Ce qui a fait dire à Guy Dollé que son groupe produisait du « parfum » en comparaison de « l'eau de Cologne » de Mittal, lors du raid de Lakshmi Mittal. Mais résultat, c'est l'eau de cologne qui a racheté le parfum! Qu'on ne s'y trompe pas, les groupes indiens remontent très vite en gamme. Et ils profitent de trois atouts fondamentaux: ils sont dirigés par des patrons indépendants et très rapides; ils sont assis sur beaucoup de cash; et ils bénéficient d'une diaspora dans le monde de plus de 20 millions de personnes, qui leur relaient l'information.
- Jusqu'où pourrait s'étendre cette expansion ?
Pour l'instant, il s'agit d'acquisitions de taille moyenne. Mais une entreprise indienne pourrait acheter Capgemini ou Atos sans problème. On pensait au début que cela ne touchait que l'informatique avec la pratique de l'offshore, qui s'est développée dans la région de Bangalore. Mais on voit que ça touche aussi la pharmacie, l'acier, les télécoms. On va le voir un peu partout. Les industriels indiens n'ont aucun complexe. Il y a trois ans, le slogan dans le pays était « Shining India » (l'Inde qui brille), aujourd'hui c'est « India poised » : l'Inde est sur orbite pour conquérir le monde. Ils ont un modèle indien qui marche bien chez eux, à la différence des entreprises étrangères en Inde, qui peinent à percer dans le pays. C'est un modèle low cost, et c'est sur la base de ce modèle qu'ils s'internationalisent. C'est vrai qu'il y a des réglementations qui mettent des barrières pour les groupes étrangers. C'est notamment le cas pour la grande distribution, ce qui gène Carrefour ou Wal-Mart dans leur volonté de pénétrer le marché indien, et qui oblige Carrefour à s'associer avec un groupe indien s'il veut entrer dans le pays. Mais ces barrières finiront par tomber et les Indiens font actuellement une course contre la montre pour prendre d'ici là des parts de marché.
Propos recueillis par Céline About
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